RECHERCHER, SAUVER et PROTEGER (Méditerranéee Centrale)

21 312*. Un nombre qui devrait faire bouger les lignes. Pourtant rien. 21 312, c’est le nombre, sous évalué, de personnes décédées en Méditerranée Centrale depuis 2014 et dans le même temps, l’abandon du programme Mare Nostrum** par l’Union européenne et l’Italie.
Pour pallier l’arrêt de ce programme, des ONGs ont décidé d'affreter plusieurs bateaux de sauvetage. Leur mission, venir en aide aux embarcations de fortunes surpeuplées d’exilés qui tentent la dangereuse traversée de la Libye vers l’Europe.
21 312, un nombre qui fait de la Méditerranée, la route migratoire la plus meurtrière au monde.
Les mouvements de migration existent depuis des milliers d’années en Méditerranée. Pourtant, plus récemment, depuis le milieu des années 1990, des milliers de personnes traversent la Méditerranée sur des embarcations de fortune depuis les côtes Nord africaines et la Turquie afin de demander l’asile ou migrer vers l’Europe. Un phénomène qui s‘est amplifié dans les années 2000.
En mer, que ce soit sur l’Ocean Viking (le bateau de SOS Méditerranée) ou sur le Geo Barents (le bateau de Médecin sans Frontière), le credo est le même, s’entraîner encore et toujours pour porter assistance aux bateaux en détresse avec à leurs bords des enfants, des femmes et des hommes qui fuient en quête d’une vie meilleure.
A terre, les politiques migratoires européennes agissent comme des remparts en refusant d’ouvrir des voies légales pour ces personnes qui tentent de changer de vie. Épaulée par Frontex (l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes) et son budget de 750 millions ***, la forteresse Europe déploie arsenal militaire et législatif pour empêcher les franchissements de frontières à terre comme en mer : drones, avions, bateaux, rétentions administratives, décrets criminalisant le travail des ONGs... L’Europe ne cesse de se réinventer pour empêcher ce que l’on appelle l’immigration irrégulière ou illégale. Dernier exemple en date, l’Italie, avec le gouvernement d'extrême droite de Giorgia Meloni, vient de passer un nouveau décret obligeant les bateaux humanitaires à rentrer au port après chaque sauvetage. Ces ports, désignés par les autorités italiennes, sont affectés de plus en plus loin de la zone de recherche. Une méthode qui essouffle économiquement les ONGs, obligeant celles-ci à de long périples en mer, et des allers- retours interminables entre les ports et la zone des sauvetages. La technique est limpide : faire perdre du temps et de l’argent alors que les tentatives de passages ne s’arrêtent pas.
Alors que vous lisez ce texte, en France, un projet de loi sur l’immigration doit être débattu par les parlementaires. Espérons que le pays des droits de l’homme n’éteigne pas ses lumières...
* missingmigrants.iom.int, mise à jour juin 2023
** L'opération Mare Nostrum est l’opération militaire et humanitaire menée par la Marina militaire entre octobre 2013 et novembre 2014. Elle fut lancée après le drame de Lampedusa ou 366 personnes perdirent la vie dans un naufrage au large de l’île.
*** site Frontex, budget 2022